Le récit des derniers jours de l’empire ottoman est un sujet d’une actualité tragique à plus d’un titre, tant par les atrocités qui ont tristement marqué cette ère troublée que par les traumatismes profonds et durables qui en sont issus. Essentiellement centré sur les aspects humain, militaire et diplomatique de cette grande tragédie, cet ouvrage nous narre ce dernier siècle des fils d’Osman, leur déclin et leurs sursauts d’orgueil, les manigances des puissances européennes et les coups de boutoir de leurs armées, qui firent certes face à une héroïque résistance ottomane mais s’accompagnèrent aussi de funestes conséquences sur les populations civiles musulmanes.

À travers les témoignages de correspondants de guerre et autres observateurs, l’auteur nous dresse surtout le tableau d’une dernière décennie sanglante qui s’entame par l’opportuniste invasion italienne de la Libye et se poursuit dans les charniers des guerres Balkaniques et la grande boucherie généralisée de la Première Guerre Mondiale avant de trouver sa conclusion dans la guerre d’Indépendance turque. Face à l’ensemble des forces coalisées et réunies autour du corps en décomposition de « l’homme malade de l’Europe », la survie des Ottomans relevait de l’ordre du miracle ; et pourtant, à chaque fois, une victoire providentielle vient sauver l’empire et lui octroyer quelques mois ou années de répit, jusqu’à ce que le mouvement national turc vienne définitivement renverser la table…

En une analyse particulièrement instructive, cet ouvrage lève aussi le voile sur les extraordinaires campagnes d’opinion qui ont oeuvré à la déshumanisation du « Turc » et préparé le terrain idéologique de la partition tant attendue de l’empire ottoman mais également de l’expulsion et de l’annihilation de millions de musulmans d’Europe par la propagande de guerre et ses mensonges, manipulations et caricatures.