Dans son précédent ouvrage « L’idéologie islamique française » paru en 2011 Aïssam Aït-Yahya soulignait le problème de la contextualisation de l’Islam pris au piège entre deux approches erronées : l’une cherchant à interpréter la religion selon les canons de la modernité occidentale, et l’autre refusant de prendre en compte cette contemporanéité. Dans ce nouveau livre, l’auteur poursuit cette analyse en abordant la question de la méthodologie du savoir en Islam et la juste réforme qui s’impose. A partir d’un essai publié en Arabie Saoudite en 1991 par le théologien Nâsir al-‘Umar sur la nécessité de valoriser l’ « étude du réel » (ou fiqh al-Wâqî’) dans la pensée religieuse musulmane et d’un écrit d’Al-Albânî sur le même sujet, l’auteur livre un commentaire argumenté tout en exposant une vision d’ensemble de ce sujet. Il prend ainsi position en faveur de l’intégration de disciplines « profanes », assimilées en Occident aux sciences humaines comme l’histoire, l’économie, les statistiques, etc. dans la production des avis jurisprudentiels musulmans (Fatwa) ainsi que dans l’élaboration d’une pensée dynamique. En se fondant sur les avis d’oulémas anciens et contemporains, il défend également l’idée que cette démarche n’est pas une trahison du savoir révélé, mais constitue à l’inverse le juste accomplissement des méthodes de production du savoir en vigueur au tout début de l’islam. S’inscrivant dans la droite ligne d’Ibn Taymiyya qui professait l’accord de la Raison et de la Tradition, Aïssam Aït-Yahya poursuit avec le commentaire de cet ouvrage l’édification d’une épistémologie musulmane à la fois profondément réformée et fidèle aux sources musulmanes originaires. Cette étude impose donc une véritable redéfinition du savoir et de la science religieuse dans le monde musulman, bouleversant à la fois les partisans d’une transmission figée des Textes comme les certitudes de ceux qui appellent à une occidentalisation radicale et inconsidérée dans la méthode d’acquisition du savoir. C’est donc une voie médiane et originale qu’il entend ici promouvoir.

Quatrième de couverture

A partir des textes de Nasîruddin al-Albânî et de Nasîr al-Umar sur la notion de fiqh al-wâqî’ ou « étude du Réel », Aïssam Aït-Yahya livre ici une étude complète et pertinente sur la méthodologie d’acquisition du savoir en Islam, tout en redéfinissant ses enjeux et ses objectifs.Quelle relation doivent entretenir savoir profane et savoir sacré ? Le théologien musulman (âlim) doit-il détenir des connaissances minimales en histoire, en géopolitique, en économie et autre pour remplir parfaitement son rôle et jouir d’une véritable crédibilité ? Quels rapports entretiennent Raison et Révélation, et plus précisément le savoir révélé et le savoir empirique ?Voilà des questions essentielles que l’auteur replace au cœur d’un débat passionnant entre différents courants islamiques en Arabie Saoudite, dont le déclencheur fut la première guerre du Golfe en 1991 et qui s’est étendu par la suite à l’ensemble du monde musulman. Il prend ainsi résolument partie pour une réforme de la conception du savoir en Islam, indispensable à la reconstruction d’une élite musulmane jalouse des enseignements fondamentaux, mais éclairée et apte à affronter les défis de notre époque.